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Histoire du lycée Dupuy-de-Lôme de Lorient

 
Depuis trois ans et demi, dix anciens élèves et enseignants du lycée Dupuy-de-Lôme recueillent minutieusement des documents sur l'établissement. Ils préparent un livre et une exposition. Ancien élève et aujourd'hui administrateur du lycée, Philippe Nineven fait partie d'un groupe de dix anciens élèves et enseignants du lycée lorientais, dont quatre membres font partie du groupe histoire de l'UTL (Université du temps libre).

- Comment est né ce projet de livre et d'exposition ? Quel a été l'événement déclencheur ?
Notre lycée a été créé en 1823. Un ancien élève avait écrit l'histoire de l'établissement depuis sa création jusqu'à la seconde guerre mondiale. Le lycée a d'abord été collège municipal, puis collège d'Aumale sous Louis-Philippe, avant de devenir lycée impériale sous Napoléon III. En 1922, on a pris le nom de Dupuy-de-Lôme qui est un ancien élève de notre lycée né à Lorient, polytechnicien et architecte naval mondialement connu ; il a inventé, entre autre, la marine cuirassée. Ce premier volume a été fait sur cette période. En 1939, c'est la déclaration de guerre et en 1943, les Alliés bombardent totalement Lorient où les Allemands construisaient une base sous-marine. Un port de guerre et un aéroport militaire s'y trouvaient. Lorient est complètement rasé et notre lycée se replie dans une ville du centre de la Bretagne : Guémené sur Scorff. Bien que les gars et les filles se retrouvent alors dans des conditions un peu précaires, un deuxième livre est écrit pendant cette période par l'association des 308 élèves. Ils fondent alors l'association de La Pomme d'Or, du nom de l'hôtel désaffecté où étaient donnés les cours. Ils racontent donc ces deux années et demi passées dans des conditions particulières. Plusieurs professeurs et élèves entrés dans la Résistance ont été pris par la Gestapo et fusillés. Trois de la Pomme d'Or font partie de notre groupe de travail. La plus jeune a 78 ans et la plus âgée 86 ans. Ils sont encore une vingtaine dans l'association.

Nous avons été le premier lycée de France en 1956 à imaginer un échange pour rapprocher les jeunesses françaises et allemandes grâce à l'un de nos professeurs décédé il y a quelques jours à 89 ans : monsieur Jules Potier. À l'époque, il fallait oser ! Le premier échange a eu lieu en 1957, j'y ai participé. En 2007, nous avons fêté le cinquantenaire de cet échange. 120 Allemands sont venus mais il y avait surtout beaucoup de Lorientais, anciens professeurs et anciens élèves. À cette occasion, j'ai retrouvé deux professeurs qui m'ont suggéré d'écrire l'histoire du cinquantenaire de Wuppertal. Je leur ai répondu qu'il serait peut-être plus intéressant d'écrire l'histoire du lycée à partir de 1945, puisque l'histoire a déjà été écrite sur la période précédente. Et ce jusqu'à 1970, parce qu'après 1968, on va passer à une autre pédagogie et un tout autre système scolaire. Cela fera l'objet d'un autre tome, de 1970 à nos jours.

C'est de là qu'est partie cette idée. Nous avons une particularité, en 1823, l'ancien lycée a été construit, puis agrandi. Il a été rasé pendant la guerre. Fin 1945, on s'est installé, les garçons comme les filles mais séparément, dans des baraques provisoires édifiées pendant l'été 1945, puisque la poche de Lorient ne s'est rendue qu'au 10 mai 1945. Ce qui devait être provisoire a duré jusqu'en 1954, où nous avons été transférés dans un lycée flambant neuf. En 2004, a commencé la reconstruction des bâtiments qui avaient subi les outrages du temps. On a donc cassé 5 bâtiments pour en reconstruire de nouveaux, aux normes.
Nous sommes un groupe d'une dizaine de personnes, anciens élèves et anciens professeurs disposant de locaux au sein du lycée, ce qui a été facilité grâce à ma fonction d'administrateur ! On a notre salle de travail, où on nous a installé tout le matériel informatique nécessaire à nos recherches. On a réuni tellement de documents qu'on s'est dit "Pourquoi ne pas constituer une photothèque? ". Elle restera par la suite au CDI et pourra être consultée librement par les anciens du lycée. On a même commencé à identifier les personnes sur les photos à partir de 1908. Nous les déposons ensuite sur internet afin d'être contacté par les anciens élèves pour compléter les légendes. Les Bretons sont des gens qui s'expatrient beaucoup, certains nous contactent d'Australie, de République Tchèque et de partout en France.

- Qu'est-ce que l'Université du temps libre ?
Il se trouve que deux personnes de notre groupe font partie de l'UTL mais nous sommes totalement indépendants. L'université du temps libre c'est une association qui existe dans beaucoup de villes de France qui permet à des gens en théorie retraités, mais certains sont là à partir de 50 ans, de faire plein d'activités, aussi bien apprendre une langue vivante que de faire de l'histoire, de la littérature, prendre des cours de dessin ou d'informatique. Par exemple, sur Lorient, ils sont 1000 membres et font 70 ateliers différents. Tout ça est mené par des bénévoles. C'est une université du temps libre, et non pas une université du troisième âge !
Nous avons pris comme nom : "Groupe Histoire du Lycée" et nous sommes totalement indépendants de l'UTL ; nous sommes attachés au lycée Dupuy-de-Lôme. Pour nous, cela englobe les deux entités lycée de garçons et collège de jeunes filles.


- Comment procédez-vous aux recherches concernant le lycée Dupuy-de-Lôme ?
On a consacré trois ans à la recherche d'archives, d'abord avec les archives départementales et municipales. Dans notre groupe, nous avons également un professeur d'histoire qui est le correspondant du lycée aux archives départementales, ce qui facilite les échanges. Deux dames de notre groupe ont pendant plus de deux ans feuilleté tous les journaux à la médiathèque de Lorient de 1945 à 1970, page par page, et chaque article concernant le collège ou le lycée a été numérisé, le commentaire relevé en fichier. Les témoignages d'anciens élèves et professeurs que nous avons sollicités arrivent de partout. A l'occasion d'événements comme la réunion des anciens de la Pomme d'Or ou de la sauvegarde du château de Soye où est né Dupuy-de-Lôme, dont le lycée porte le nom, on demande aux journalistes que l'on connait de venir nous voir. Ils font un article et dans les quinze jours qui suivent, des messages arrivent de partout. Nous ne sommes pas trop de dix pour traiter toutes les informations reçues ou qui nous sont adressées !

- Y a-t-il une association d'anciens élèves pour vous aider dans votre tâche ?
Hormis la Pomme d'Or, il n'existe plus d'association pour l'instant, un projet est en gestation. L'association des anciens élèves du lycée Dupuy-de-Lôme et du collège de jeunes filles de Lorient avait été relancée en 1946, après-guerre et puis elle n'a duré que jusqu'en 1967. Elle a cessé d'exister quand il n'y a plus eu de bénévole pour s'en occuper. En 1950, il y avait quand même 350 membres. Mais ce type d'association n'existe en général que grâce à quelques personnes. Si ces personnes déménagent ou décèdent, c'est fini.
Et puis les jeunes générations sont beaucoup moins impliquées, ils ne sont que de passage dans le lycée contrairement à ma génération. Nous passions 8 ans dans le même établissement et bien souvent nous étions internes. Nous avions également ici la prépa navale et la prépa Saint Cyr. Entre 1850 et 1925, les trois quarts des amiraux et vice-amiraux français sortaient de Dupuy-de-Lôme.

- Comment les anciens élèves vous contactent-ils ? Que vous apportent-ils ?
Soit ils s'adressent directement au lycée, soit suite aux articles parus dans la presse, ils nous écrivent sur notre adresse email. Beaucoup nous apportent leur témoignage mais aussi beaucoup de photos et pas seulement des photos de classe. Par exemple, récemment, j'ai reçu d'un couple qui a passé 8 ans dans le lycée, une série de photos de famille avec le lycée avant-guerre, des photos de bal de la St Sylvestre, des monômes des fêtes du lycée et des remises des prix en fin d'année, etc.

- Quelles sont vos relations avec le proviseur actuel, M Collas ? Dans quelle mesure vous aide-t-il ?
C'est un ami. Il nous a beaucoup aidés. Il a fait mettre depuis le départ, une salle à notre disposition avec tout le matériel nécessaire, y compris l'informatique. C'est un historien qui a conservé sa chaire d'histoire à l'Université de Bretagne Sud. Il met tous les ans à notre disposition des élèves stagiaires en fin de cycle, qui vont devenir historiens ou archiviste. Ils font alors des recherches plus poussées sur des thèmes qui nous intéressent.

- Y avait-il un fond d'archives au lycée ?
Oui mais très réduit car tout a brûlé pendant la guerre. On le reconstitue petit à petit avec tout ce que les gens nous envoient. D'anciens professeurs nous envoient les documents qu'ils avaient conservés, certaines familles de proviseurs également. Derrière, nous faisons un travail de numérisation, de datation et d'archivage.


- Qu'est-ce qui caractérise votre lycée ? Quels événements ont marqué l'histoire de l'établissement ?
Ce qui caractérise notre établissement, ce sont ces quatre transferts successifs à cause de la guerre et puis c'est un lycée qui est en plein centre-ville sur un terrain de 9 hectares. Cela a été une volonté lors de la reconstruction. Les bombardements ont eu lieu en janvier 1943. Et dès le mois de juin, le ministère de la reconstruction qui était pourtant aux ordres de Vichy, avait déjà engagé un urbaniste à Paris, Monsieur Tourry pour penser à la reconstruction de la ville. Le plan d'urbanisme de reconstruction de la ville de Lorient a été accepté dès 1946. Et au coeur de la ville, un peu comme un poumon vert, le lycée prend place.

- Quel est le thème et le fil rouge de votre exposition ?
Uniquement les photos ! Toutes celles de la guerre que nous a transmise la Pomme d'Or. Nous avons identifié les personnes photographiées et nous avons retraité les images pour les restaurer un peu. Et puis toutes les photos retrouvées depuis 1945 et elles sont nombreuses : plusieurs centaines. On veut faire venir du monde pour récolter de nouveaux documents et puis pour compléter les photos où il nous manque des noms et aussi pour annoncer le livre qui sortira en fin d'année.

- Comment avez-vous fait la sélection de ce qui va être exposé ?
On ne fait pas de sélection, on présente tout ! Ce qui représente mille photos.

- Parlez-nous de "La Pomme d'or". Voulez-vous nous faire part d'une anecdote en particulier ?
Quand tout a brûlé, un certain nombre d'élèves avait quitté la région au début des bombardements. Les familles les avaient envoyés dans d'autres villes. Dès le 18 janvier 1943, après les deux nuits de bombardements, ceux qui étaient restés à Lorient, gars et filles ont rejoint à pieds ou en vélo les structures mises en place deux mois auparavant à Guémené sur Scorff, à 40 km de là. Ce sont eux qui pour la première fois en France sont à l'origine du premier lycée mixte. Ils ont vécu des conditions très particulières car ils n'avaient plus de matériels, de fournitures ni de manuels. Il y a eu une amitié indéfectible qui s'est créée entre eux y compris avec les professeurs. Malgré leur âge, ils ne rateraient pour rien au monde l'assemblée annuelle pour retrouver leurs compagnons d'infortune. Une fois par an en septembre, ils retournent à Guémené. Ce sont des souvenirs qui ne s'éteignent qu'avec la mort de ces derniers.

- Voulez-vous nous faire part d'un sentiment ou d'une anecdote ?
Ce qui nous tient à coeur, c'est de rétablir la mémoire des professeurs et de la dizaine d'élèves déportés et fusillés pendant le guerre et qui avaient été un peu oubliés. Même s'ils figuraient sur les tables de notre lycée, on ignorait leur lieu de naissance, leur histoire, et suite à nos recherches, nous avons tout retrouvé. Pour le plus grand plaisir des mairies qui avaient des états civils incomplets ! C'est un devoir de mémoire que nous avons voulu faire alors que nous avons encore des témoins de ce monde.

Crédit photo : DR.

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