Imaginez-vous être au téléphone avec votre professeur de sciences naturelles de la classe de seconde !
- Comment est née l'idée de retrouver d'anciens camarades de classe ?
Tout est parti d'une suite de hasards.
Le premier, c'est grâce à un réseau social qui un jour vous remet en contact avec une personne que vous n'aviez pas vu depuis plus de 20 ans, mais dont le seul nom vous ramène à des souvenirs de jeunesse, et là en l'occurrence aux années d'avant baccalauréat. À 46 ans, cela fait bizarre. Un mail puis un coup de fil : "Oui c'est moi ! Incroyable ! Comment vas-tu ? Que deviens-tu ? Tu vois toujours des anciens ? Ah oui, et tu te souviens d'un tel et de l'autre là, Richard... C'est quoi son nom déjà ? On se fait un déjeuner ? Promis ? À bientôt". Ni une ni deux, j'ai tapé le nom du fameux Richard dans l'ordinateur qui l'a immédiatement retrouvé. Un coup de fil et même dialogue.
Deuxième hasard, une publicité sur ce réseau social : "Retrouvez vos amis de classe !" et forcément un clic pour arriver sur... Trombi.com et constater qu'il y a déjà des inscrits dans mes années de passage dans ce cours privé de la capitale. Vite un papier, un crayon et je commence à noter ces noms dont certains ravivent des souvenirs et d'autres pas. Ce papier ne me quittera pas pendant plus de deux mois.
C'est ce jour-là qu'est véritablement partie l'envie de faire quelque chose. Pendant tout un week-end j'ai égrené tous les réseaux sociaux que je connaissais et ceux que je découvrais avec une idée en tête : établir la liste la plus longue possible de retrouvailles potentielles. Fin du week-end : 240 noms notés sur une feuille de papier de personnes passées dans cet établissement scolaire et une petite vingtaine sur l'année cible de ma recherche : 1981. Il y a tout juste trente ans.
Un premier cercle fut rapidement constitué. Nous avons attendu d'être six anciens, très proches à l'époque, pour organiser un dîner. Joli moment que celui où on reconnaît immédiatement un ami de trente ans dès son entrée dans le restaurant. De discussion en discussion, des noms s'ajoutent, des élèves mais aussi des professeurs, des pistes de contacts se précisent. À la fin du dîner, on pourrait réunir 40 voire 50 personnes ! Impossible d'organiser un dîner dans ces conditions.
Troisième hasard, un des six organise un pique-nique quelques semaines plus tard. L'idée fait mouche. On va rassembler à l'occasion d'un piquenique les anciens du Cours Arthur Rimbaud ! Mais le plus difficile ou plutôt le plus long reste à faire : retrouver ces personnes !
- Comment s'est déroulée votre recherche d'anciens camarades de classe ?
Nous avons monté un plan de bataille. Chacun des six était chargé de retrouver le plus d'anciens possibles par tous les moyens possibles. La chasse était ouverte. Création d'une page du pique-nique sur Internet, puis retour aux réseaux sociaux pour contacter tous les noms récoltés : Trombi, Internet puis recherche des numéros de téléphone dans les annuaires. Un point tous les 3 ou 4 jours sauf événement ! Cela a l'air d'un travail de fourmis mais qui à chaque succès s'est soldé par de nouveaux noms, de nouveaux contacts, de nouveaux chasseurs et un regain de motivation pour retrouver le suivant sur la liste. Finalement cela ressemble assez aux réseaux de vente directe. Chaque contact est un potentiel de nouveaux contacts, qui lui-même trouve de nouveaux contacts. La liste s'allonge jour après jour avec des remontées d'un peu partout, d'où l'intérêt de la page sur Internet pour ne pas toujours être en première ligne.
- Y a-t-il une association d'anciens élèves dans votre établissement ?
C'était le principal handicap dans notre démarche. Non seulement il n'y avait pas d'association d'anciens élèves, mais pas non plus d'annuaire ni de photos de classe. De plus, l'établissement a fermé ses portes au début des années 90 ! Toute la recherche a donc été basée uniquement sur les souvenirs des uns et des autres.
- Combien de temps cela vous a-t-il pris pour organiser cette réunion ?
Il s'est écoulé trois mois entre le premier contact et l'organisation du piquenique le 22 mai dernier. Cela peut paraître long, mais ce n'est pas une tâche à plein temps. En revanche si l'on agrège le temps total passé par tous les chasseurs, cela doit finir par être très impressionnant !
- Était-ce difficile ?
Difficile ? Non. Plutôt plein de joies de retrouvailles. Imaginez-vous être trente ansaprès au téléphone avec votre professeur de sciences naturelles de la classe de seconde ! Ou un mail un matin : "Salut toi, il faut trente ans pour se rendre compte que l'on habite à moins de 5 kilomètres l'un de l'autre !". Imaginez encore un coup de fil : "Allo... C'est Serge le Directeur du Cours Rimbaud. Vous pouvez compter sur moi pour votre piquenique. Je suis à 900 kilomètres mais je serai là.» Tous les jours ou presque une bonne nouvelle.
- Combien de personnes étaient nécessaires pour organiser l'événement ?
Pour la chasse, il y a eu une dizaine de personnes actives sur pratiquement deux mois. Nous avons même en cours de route monté un concours de chasse pour donner encore plus de motivation. Pour la logistique seulement deux personnes. C'est l'atout majeur de cette forme de rassemblement. C'est dehors, chacun vient avec qui il veut, chacun avec son repas. On ne peut pas faire plus convivial. Votre principal souci est de trouver le lieu, d'avoir les autorisations, de tenir en haleine et de relancer les inscrits pour maintenir l'envie et éviter au maximum les désistements de dernière minute, et le jour J, un minimum de prestations d'accueil avec un petit verre d'arrivée et des petits cadeaux.
- Combien de personnes ont été invitées, combien ont répondu positivement combien de personnes sont finalement venues ?
Le jour du piquenique, la liste de chasse se composait de 123 personnes, dont 86 avaient été localisées et contactées. C'est énorme lorsque l'on sait que nous n'avions comme ressource de recherche que les souvenirs des uns et des autres. Ces souvenirs remontaient à 25 ou 30 ans en arrière !
Sur les 86 anciens, 53 ont répondu positivement, et la très grande majorité de ceux qui ont renoncé l'ont fait par éloignement. Il est vrai que venir de Buenos-Aires ou Hawaï pour un pique-nique au Parc de Saint-Cloud reste une chose un peu compliquée encore aujourd'hui. Finalement on a comptabilisé 47 personnes le jour J avec des désistements autant du côté des élèves que de celui des professeurs, même si l'absence de ces derniers a été bien plus remarquée.
- Qu'avez-vous fait lors de vos retrouvailles ?
Et bien finalement, très peu mangé et beaucoup bavardé et rigolé. Tant de souvenirs, tant de choses à raconter. Lancé à 11h00 du matin, nous avons fait place nette à 18h00. C'était le Pique-nique des anciens amis du Cours Arthur Rimbaud.
Et un grand moment d'émotion avec la lecture de la lettre du Directeur qui, au dernier moment pour raison de santé, n'a pu faire les 900 kms qui nous séparaient. Larme à l'oeil, voix défaillante... Inoubliable... Que du bonheur !
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